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Rôle des femmes pour sa perpétuité contre vents et marées dans des communautés fortement islamisées

 

Nous avons effectué une visite à la famille de Khady FALL dite « Séla » pour une session spéciale dont le but est de recueillir l’avis simultané de trois femmes appartenant à trois générations concernant la pratique du sacré. Nous avons ainsi rencontré Khady FALL, sa mère Coura DIOP et sa fille Fatou SARR, dans leur concession au village de Hann-Pêcheurs.

Comme nous avons pu le souligner dans quelques uns de nos rapports précédents, Hann-Pêcheurs est fortement marqué par l’importance de la franche de sa population qui est de religion musulmane. La présence de l’Islam a eu un impact sur les pratiques animistes à tel point que, les hommes, drapés quotidiennement dans leur boubou, chapelet en main, ont de la peine à reconnaître que la pratique du sacré est encore présente chez eux. Il faut aussi comprendre leur attitude dans la mesure où l’Islam condamne cette pratique animiste, qui correspond à la croyance en un Pouvoir surnaturel autre que Dieu.

Mais parallèlement à cette position des hommes, qui attestent et signent le fait que la pratique du sacré n’est plus en cours, l’entretien avec ces trois générations de femmes montre en quoi ces dernières croient encore fermement à ces réalités. S’il est vrai que les formes d’expression de ces croyances peuvent varier d’une génération à l’autre, il subsiste une constance : le sacré non seulement fait partie intégrante de leur vie, mais aussi leur assure sécurité physique et assurance pour leurs moyens d’existence en tant qu’êtres humains aux besoins multiples. En effet, devant nous trois personnes de trois générations expriment leur attachement à la chose sacrée des façons suivantes :

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    Une grand-mère, Coura DIOP, qui illustre à travers des exemples, les pratiques sacrées et les effets positifs palpables chez les personnes qui respectent ces croyances. Elle met en parallèle la rupture de certains jeunes avec ces pratiques et certaines malédictions qu’ils vivent;
  • Khady FALL, qui confirme le fait que dans leur travail, ces pratiques sont encore en cours dans la mesure où, les femmes de sa génération continuent à faire recours à des prières de la part de personnes connues pour un certain pouvoir qu’elles détiennent : recours à des personnes dépositaires des connaissances magiques pour la réussite dans le travail ou se prémunir d’un mauvais sort. Donc pour elle, les femmes de sa génération sont acquises à cette cause. Elle est plus préoccupée pour les générations futures, trop exposées aux effets potentiels de la globalisation, surtout avec les nouvelles technologies de communication;

  • Enfin, Fatou SARR la fille de Khady, âgé de 36 ans, qui à deux enfants, adopte une attitude qui démontre, qu’elle n’a pas remis en cause ces croyances si bien ancrées dans les familles de pêcheurs. En effet, tout en étant une fille, qui profite pleinement des avantages de la modernité (utilisation des réseaux sociaux pour communiquer avec des personnes de sa génération) elle partage fortement le fait que, pour les jeunes générations: « remettre en cause la tradition y comprise la croyance au sacré, pourrait comporter des dangers  pour la nouvelle génération ». Elle insiste sur le fait que, tout n’est pas à prendre dans la modernité.

Ces positions extrêmement claires sur le sacré de la part des femmes, montrent à quel point, elles assurent la perpétuité des modes de penser et d’agir dans les sociétés en général. Il faut d’ailleurs rappeler que l’initiation des jeunes au sacré dès le plus jeune âge, est assurée par les femmes, comme nous l’avons constaté partout ailleurs : à Kayar, à Yoff et à Saint Louis.