L’hémicycle du Parlement Européen (PE) à Bruxelles fut le 29 mars 2019 l’hôte d’une conférence de prestige sur l’Océan, une première pour le PE. La Conférence, co-organisée par le PE et la Commission Européenne (CE) fut ouverte par Gésine Meissner, Envoyée Spéciale aux Affaires Maritimes du Président du PE (à gauche). Un grand nombre d’intervenants de tous horizons se succéda jusqu’en début de soirée: des euro députés, des fonctionnaires avertis de la CE et des gouvernements nationaux, des scientifiques, des représentants de la jeunesse, de la société civile, du monde de l’entreprise, de l’éducation et des media. Les thèmes abordés furent la nécessité d’engagement pour l’océan, le développent durable, la reconnaissance du rôle clef de l’océan dans la régulation du climat et les nombreux biens et services qu'il nous rend.
Le premier intervenant, Karmenu Vella, Commissaire européen en charge de l’Environnement, des Affaires Maritimes et de la Pêche, se dit heureux des quelques mesures prises pour inverser la courbe de croissance des plastics comme l’interdiction des objets plastiques à usage unique et les investissements accrus dans le recyclage ainsi que de l’amélioration des stocks de 59 d'espèces de poissons par rapport aux 9-12 années précédentes. Il se dit fier du soutien à hauteur de 600 millions d’euro obtenu pour la pêche et l’aquaculture durables, pour le renforcement du suivi et du contrôle de la pêche dans les pays en voie de développement, pour la sécurité en mer et les accords de partenariat bilatéraux avec, par exemple, la Chine et le Canada.
Le Commissaire à la Recherche, la Science et l’Innovation, Carlos Moedas, insista sur l’apport de la recherche en matière de santé publique et sur les enjeux liés à la préservation de l’Océan. Il invita l’audience à s’inspirer de la ténacité dont a fait preuve le jeune hollandais Boyan Slat pour avertir le monde des menaces que représente la pollution de l’océan par les plastiques.
C’est cet état d’esprit combiné à une science de haut niveau qui devrait conduire à la transformation radicale de nos systèmes économiques dans un avenir proche, transformation qui devrait inclure une attention particulière sur la durabilité de l’ocean.
Deux jeunes belges rapportèrent sur les manifestations étudiantes des «vendredis pour l'avenir» exigeant des actions immédiates et fortes pour la protection du climat et des océans dont le renforcement des lois de régulation de la pêche, l’arrêt de la surpêche et des rejets de plastique ainsi qu’un changement politique pour une meilleure justice sociale, environnementale et fiscale. Des fonds publiques devraient accélérer la transition vers le développement durable, dont la mise en oeuvre des Objectifs du Développement Durable (ODDs), interconnectés, adoptés par les Nations Unies en 2015.
Ils défièrent les politiques et les industriels de faire preuve de plus de courage dans cette direction. De telles interpellations par la jeunesse sont de plus en plus fréquentes ce qui ne veut pas dire, hélas, qu’elles soient prises en compte par les politiciens. Il semble qu’il faille plus de manifestations pour pouvoir aller au-dela du symbole et des habitudes.
Le Directeur Général de MARE, João Aguilar Machado, caressa l’espoir que, grâce à la nomination de jeunes élus au Parlement Européen lors des élections du 26 mai prochain, un Comité spécial sur les Océans puisse être créé au PE avec l’objectif de travailler à une meilleure gouvernance de l’Ocean.
Son avis est qu’il faut renforcer la mise en pratique de la législation existante et améliorer la collaboration et la coopération entre les différentes politiques, des pays et des régions. Quelque progrès a été fait depuis la première lettre politique sur l’Océan émise il y a quatr'ans par la Haute Représentante de l’Union Européenne aux Affaires Etrangères et à la Politique de Sécurité ensemble avec différents Commissaires européens, comme les accords visant l’interdiction de la pêche en Arctique pour les 16 prochaines années et la lutte renforée contre la pêche illicite, non-déclarée et non-réglementée (pêche INN). Il termina son intervention en observant que la crédibilité en l’Europe et dans le monde commence par la remise en ordre de la maison européenne.
Le Président du Parlement européen, Antonio Tajani, souligna l’importance de l’Accord de Paris pour le Climat et l’urgence de mettre en oeuvre les objectifs de Développement Durable. A ce titre il rappela les efforts consentis par l’Europe pour le succès des négotiations et de leur mise en oeuvre.
Les efforts consentis pour l’abolition des objets plastiques à usage unique et l’augmentation du recyclage correspondraient à l’élimination des routes d’un million de voitures.
Il réaffirma combien il était fier d’accueillir la conférence et qu’une proposition de financement pour l’économie de l’Océan à hauteur de 120 milliards d’euros était mise en avant à l’horizon 2021-2027. Il en profita pour susciter la contribution des Etats Membres.
Nombreux furent les intervenant réclamant la planification d'un financement appréciable de la recherche sur l’Océan dans le prochain programme cadre Horizon Europe (2021-2027).
En dépit de la longueur de la conférence on sentit une énergie neuve vers un nouveau départ. C’est une grande chance. L’Europe a clairement progressé en terme de législation et de contribution aux processus internationaux.
Cependant l’Europe fait aussi face en son sein à l’opposition des Etats Membres à la mise en oeuvre des engagements comme notamment l’application de certains aspects de la nouvelle Politique Commune de la Pêche ou les freins apportés à la transition vers les énergies nouvelles et le refus d’abandonner le charbon.
Ainsi, toutes les bonnes intentions exprimées durant cette conférence ne deviendront réalité qu’à la suite d’actions sérieuses visant une justice bleue et un développement durable avec en point de mire l’Ocean dans la mise en oeuvre des ODDs. Plutôt que de réitérer les échecs il s’agit de foncer pour le ODDs dans un environnement politique favorable. La science est du côté des vainqueurs.
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Traduction par Dr. Christiane Lancelot.