Le Parlement européen a voté le 8 juillet 2010 une résolution concernant le régime d'importation dans l'UE des produits de la pêche et de l'aquaculture dans la perspective de la future réforme de la Politique Commune de la Pêche (PCP). Dans ses considérations générales, la résolution note que "la production communautaire de produits de la pêche et de l’aquaculture est nettement insuffisante pour couvrir les besoins de l'industrie de transformation et la demande croissante des consommateurs et elle le restera" et reconnaît "la nécessité de promouvoir une consommation responsable, fondée sur la qualité et la viabilité plutôt que sur la quantité." La résolution se réfère spécifiquement à la politique commerciale et douanière; aux aspects environnementaux, sociaux, de santé et de qualité; à la révision de l'Organisation Commune des Marchés (OCM); à l’information du consommateur et à l'aquaculture.
En matière de politique commerciale et douanière, la résolution souligne que "Bien que les produits de la pêche et de l’aquaculture fassent encore l'objet d'une protection douanière théorique... cette protection est significativement réduite en pratique par diverses exemptions et réductions, autonomes ou conventionnelles, dont l'application fait que les importations effectivement frappées des droits NPF (applicables par défaut) représentent environ 5 % du total." Elle note aussi que, "la politique consistant à ouvrir le marché communautaire aux importations de produits de la pêche et de l’aquaculture est appelée à se poursuivre… La conclusion du volet AMNA du cycle de Doha sur la base actuellement envisagée de la "formule suisse" aurait pour effet de ramener le taux maximum de droit de douane applicable aux produits de la pêche et de l’aquaculture dans l'UE de 26 % à environ 6 % et le taux moyen de 12 % à environ 5 %. … Une telle décision, outre le fait qu'elle réduirait presque à rien l'effet protecteur des tarifs encore en place, éroderait sévèrement les préférences accordées ou en cours de négociation aux pays en développement." Le Parlement exige dès lors que les produits de la pêche et de l’aquaculture soient traités comme produits sensibles pour l'application de la "formule suisse" dans le cadre des négociations AMNA du cycle de Doha à l'OMC, afin de préserver la valeur des préférences accordées à certains partenaires et l'efficacité des mécanismes de l'OCM.
Ce chapitre de la résolution souligne également que "l'UE étant tenue d'assurer une cohérence entre les objectifs de sa politique de développement (éradiquer la pauvreté, développer une pêche locale durable) et sa politique commerciale, les pays en développement devraient être encouragés à exporter des produits de la pêche ayant une plus grande valeur ajoutée, à condition que le poisson provienne de stocks bien gérés et durables et remplisse les conditions sanitaires requises".
La résolution insiste sur la nécessité pour l'Union européenne de garder le contrôle des préférences commerciales qu'elle accorde à certains partenaires en exigeant l'application de règles d'origine strictes, basées sur le concept de produits "entièrement obtenus". De manière générale, l'un des objectifs essentiels de la politique communautaire en matière d'importation de produits de la pêche et de l’aquaculture doit être d'assurer que les produits importés satisfassent aux mêmes exigences, dans tous les domaines, que celles qui s'imposent à la production communautaire. Dans ce contexte, le Parlement invite la Commission à mettre en œuvre tous les instruments à sa disposition pour assurer le respect par les principaux pays exportateurs de produits de la pêche et de l’aquaculture vers l'UE des engagements pris à Johannesburg et l'application par ces pays de politiques rigoureuses en matière de conservation des ressources, et exige que toutes les préférences commerciales accordées par l'UE sur ces produits soient systématiquement assorties de conditionnalités rigoureuses tant en matière environnementale qu'en matière sociale - les dispositions incluses à cette fin dans les accords conclus comprennent des mécanismes crédibles de surveillance du respect des engagements pris et de suspension ou de retrait pur et simple des préférences en cas de violation. Dans le cas des pays en développement, il réclame la mise en œuvre de programmes spécifiquement conçus pour accorder une assistance technique et, le cas échéant, un soutien financier, afin d'aider les États concernés à respecter leurs engagements sociaux et environnementaux.
La résolution insiste sur le fait qu’il faut absolument tenir compte de la réalité incontournable que représente la concurrence très vive des importations à bas prix, produites grâce à des techniques dommageables pour l'environnement ou qui s'apparentent à une forme de dumping social.
Dans l'exposé des motifs, qui accompagne la résolution les difficultés à consilier les différents intérêts des acteurs sont reconnues. En relation aux importations globales des produits halieutiques pêche et aquaculture confondues, l'exposé constate:
"... La question du régime d'importation des produits de la pêche et de l'aquaculture (PPA), c'est-à-dire des conditions dans lesquelles des produits d'origine extérieure à l'UE sont admis sur son territoire, en complément de, ou en concurrence avec, les produits issus de la pêche et de l'aquaculture européenne est, en effet, une question majeure, incontournable dans toute analyse de ces secteurs particuliers de l'économie européenne.
Les chiffres sont on ne peut plus éloquents:
· Le marché de l'UE, d'environ 12 millions de tonnes et 55 milliards d'euros en 2007, est le premier marché du monde pour les PPA, devant ceux du Japon et des États-Unis.
· En forte croissance depuis 2005, il est de plus en plus dépendant des importations, à tel point que le taux de couverture de la consommation par la production communautaire est aujourd'hui inférieur à 40 %, soit un taux de dépendance des importations de plus de 60 %.
· Les prévisions de consommation indiquent que la demande pourrait s'accroître encore d'environ 1 500 000 tonnes d'ici à 2030 et que cet accroissement devra être couvert dans sa quasi-totalité par des importations supplémentaires.
De toute évidence, la production communautaire ne suffit pas et ne pourra jamais suffire à satisfaire cette demande. Cette dépendance des importations recouvre, d'un segment du marché à l'autre (espèces, types de produits, circuits de distribution), des réalités complexes et diversifiées."